« Un roman d’une telle envergure… »
Papier de Daniel Ducharme dans Ecouter, lire, penser du 2 novembre 2012
Je viens d’achever la lecture de La Légende de Little Eagle, un roman à grand déploiement de Florian Rochat. Disponible sur Amazon à un prix dérisoire (moins de trois dollars canadiens sur le Kindle Store), ainsi que dans d’autres boutiques virtuelles telles que Kobobooks, iTunes, etc., ce roman est publié par l’auteur lui-même qui a décidé, pour des raisons qui le regardent, de ne pas passer par un éditeur. Autrement dit, il s’agit d’une auto-publication. Peut-être avez-vous des préjugés sur ce mode d’édition que permet, beaucoup plus facilement qu’avant, l’univers numérique. Si c’est le cas, ils vont tomber un à un en lisant ce roman que je considère d’emblée comme un grand roman, c’est-à-dire un roman dont l’auteur a le souffle nécessaire pour vous entraîner d’un village de Bourgogne au Montana en passant par Londres et la Corse et qui vous fera découvrir le modus operandi des pilotes de guerre au cours de la Deuxième guerre mondiale, les Blackfeet du Montana, des autochtones dont plusieurs, à l’instar du héros de ce récit, John Philipp Garreau, ont du sang canadien-français dans les veines ainsi que le lien avec l’écrivain Antoine de Saint-Exupéry, l’auteur du Petit Prince, qui joue un rôle non négligeable dans les méandres de ce récit grandiose.
Voici une version abrégée du quatrième de couverture: « Tout débute quand Hélène Marchal, journaliste dans la quarantaine, hérite d’une maison appartenant à ses parents à Verdeil, en Bougogne, dont elle n’avait pas mis les pieds depuis l’enfance. En prenant possession de la maison, sur un rayon de la bibliothèque de son père, elle découvre un bout de papier qui dépasse d’un ouvrage. C’est une copie carbone d’une lettre adressée en 1947 par son grand-père maternel aux parents du premier lieutenant John Philip Garreau, pilote de chasse dans l’armée américaine. Touché par un chasseur allemand, son appareil était devenu ingouvernable alors qu’il survolait Verdeil. Et il aurait piqué droit sur la maison si John Philip Garreau avait choisi de sauver sa peau en sautant en parachute, au lieu de rester à bord et d’éviter l’obstacle de justesse. Mais il s’était sacrifié, et s’était écrasé dans un champ tout proche. Or, précise la lettre, le grand-père d’Hélène, sa grand-mère, et leurs deux enfants, dont sa mère alors âgée de quatre ans, se trouvaient sur les lieux. Hélène comprend qu’elle n’aurait pas pu voir le jour sans l’héroïsme de ce pilote. Et qu’elle a donc envers lui une dette considérable. Bouleversée, Hélène veut savoir qui était ce John Philip Garreau, un très jeune homme de dix-huit ans, venu se battre en Europe. Depuis Browning, petite ville du Montana, révèle l’adresse figurant sur la lettre. Un beau matin, elle a pris sa décision: elle va se rendre là-bas, non seulement pour tenter de trouver des informations à son sujet, mais également de raconter son histoire. Qui prendra parfois les contours d’une légende. »
La légende de Little Eagle est un roman d’enquête où les archives jouent un rôle fondamental. En effet, c’est à travers les documents qu’Hélène Marchal mettra à jour cette légende. J’ai du mal à comprendre pourquoi un roman d’une telle envergure n’ait pas trouvé un éditeur digne de ce nom. En tous les cas, Florian Rochat est bienvenue chez ÉLP éditeur s’il en a envie…
Florian Rochat, La légende de Little Eagle, 2011, disponible sur la boutique Kindle d’Amazon en cliquant sur ce lien.
La République des livres numériques
A propos de Cougar Corridor
Papier d’Eminian dans le Bouquinovore, 28.10.2013
Ancien journaliste, amoureux de la nature, Florian Rochat qui vit au pied des montagnes du Jura suisse est aussi un familier de l’Ouest américain, notamment du Montana. Après avoir publié deux livres chez des éditeurs traditionnels, il s’est engagé depuis 2011, dans la voie de l’auto-publication numérique. Il a eu la gentillesse de m’adresser son roman Cougar corridor.
Dans le Montana, un enfant tué par un couguar déclenche un mouvement de révolte parmi la population locale. Il y a ceux qui veulent éliminer tous les lions de montagne immédiatement pour qu’un tel accident de se reproduise plus, citoyens ordinaires ou promoteur immobilier sur un projet en cours. Et il y a ceux qui connaissant bien ces félins ont d’autres propositions à faire, comme Julie une écologiste d’origine française qui veut aménager des corridors naturels facilitant la circulation des couguars dans cette région en pleine mutation urbaine. Sans entrer dans les détails, l’intrigue est pimentée par l’enlèvement de Julie et une sombre histoire de vengeance liée à la guerre du Vietnam.
Florian Rochat se débrouille plutôt bien pour mêler intrigue policière et plaidoyer écologique pour la sauvegarde des couguars, dans un roman s’inscrivant très légitimement dans la tradition du Nature Writing cher à mon cœur. L’écrivain connaît bien le pays et son histoire, lardant son texte de détails instructifs sur l’immigration ou les mouvements et groupuscules politiques, des écologiques aux milices du Montana, ainsi que de références à des traditions indiennes. Quant aux couguars, ils n’ont aucuns secrets pour lui et il nous les transmet, pas toujours avec subtilité mais c’est toujours intéressant et instructif.
Le roman n’est donc pas exempt de quelques passages un peu maladroits ou naïfs, je pense aussi à la présentation des personnages au début du roman et aux rares scènes romantiques entre les deux héros Julie et Mike (encore que là, ce soit un travers commun à énormément de romanciers, comment parler d’amour simple, sans être nunuche ?), mais tout le reste tient assez bien la route. L’écrivain aime les couguars et sa plume, dans deux beaux discours des défenseurs des lions de montagne s’adressant à la population vociférant, dégage de l’émotion et touche le lecteur.
Un roman agréable à lire, d’autant que coïncidence, la problématique des loups revient dans l’actualité en France et s’apparente aux problèmes de fond soulevés dans ce livre. Mon avis n’a certes pas valeur de référence mais sachez que Jim Fergus en pense beaucoup de bien « Florian Rochat a écrit un roman d’une étonnante justesse sur l’Ouest américain d’aujourd’hui. Méticuleusement documentée et habitée par de vrais personnages de chair et de sang, Cougar corridor est une histoire poignante et magnifique sur le thème de l’affrontement entre l’espèce humaine et le monde animal sur une planète qui se rétrécit. Hautement recommandé. »